Quand tout s’écroule, la parole permet-elle de survivre?

Pour répondre à la question, je prendrai un détour en me référant à un témoignage; celui d’un homme confronté au déshonneur, à l’isolement extrême, à la souffrance physique et psychique cela, dans la durée et la répétition. Je pense qu’une telle expérience peut aider à penser ce qui permet à un homme de continuer à vivre quand tout s’écroule.

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À quoi sert une psychanalyse quand on hérite de familles massacrées et de pays disparus ?

On pourrait répondre : « à rien »,

si on pense qu’après une analyse on ressent moins cette douleur déchirante de voir les derniers survivants nous quitter, emportant avec eux aussi bien les souvenirs de leur enfance passée dans un ailleurs qu’on ne connaîtra jamais, que les événements insoutenables qu’ils ont traversés et qui nous laissent à jamais privilégiés et coupables d’en avoir été épargnés ;

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Une psychanalyse, Pourquoi ? Comment ?

Ils ou elles ne sont pas malades au sens organique du terme. Pas de fièvre, pas de sang, pas de douleurs physiques. Enfin pas toujours. Les examens réclamés par le médecin généraliste, puis par le spécialiste consulté sur recommandation du premier, se sont révélés négatifs. En apparence donc, tout va bien. Mais au fond, ils ou elles sentent bien que  « ça ne va pas ». Ils ou elles éprouvent par exemple d’étranges sensations de mal-être, des crises d’angoisses sans explication, des paniques sans motif apparent. Ils dorment mal ou font d’horribles cauchemars. Elles hésitent sans cesse pour accomplir les actes les plus insignifiants ou restent des heures plongées dans des abîmes de perplexité. Ils ou elles se déclarent notoirement « peu satisfaits » par leur vie sexuelle. Ils ou elles se disent en outre « victimes » d’emportements aussi intempestifs qu’inexplicables avec leur entourage proche. Des ratages incontrôlés dans leurs relations professionnelles ou privées empoisonnent leur vie au quotidien. Alors, pourquoi pas une psychanalyse ?

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La psychanalyse est-elle réservée aux riches ? par Patrick Declerck

Cette question revêt, au fond, un triple sens. Le premier et le plus manifeste pose la simple question de l’accessibilité financière de tout un chacun à l’analyse. Le deuxième, plus insidieux, semble laisser entendre que la psychanalyse serait, à l’instar par exemple de la pratique du golf, un luxe à l’usage des riches. Le troisième, plus encrypté encore, laisse planer le soupçon d’un éventuel élitisme psychanalytique.

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Une psychanalyse, pourquoi ça fait mal ?

Visiteur: (…) Oui j’ai des questions: Pourquoi la psychanalyse fait mal?

Squiggle: Je ne suis pas certain de comprendre votre question. Que voulez-vous dire par "fait mal"?

Visiteur: Je veux dire "est douloureuse" par exemple, ou "fait souffrir". On dit parfois "il faut souffrir pour être beau", ça sonne comme une évidence. Avec la psychanalyse aussi, on peut être plus soi-même, être plus libre, être plus "beau", mais il faut traverser des grandes aires de souffrance. Et bien sûr ça a l’air normal, "il faut relire la page pour pouvoir la tourner", "on ne digère que ce qu’on a gouté", etc… c’est du savoir populaire, mais pourquoi en est-il ainsi? pourquoi faut-il souffrir pour être beau? pourquoi la psychanalyse doit-elle faire mal?
Je conviens que ma question est peut être un peu naïve, mais c’est une vraie question pourtant.
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Y a-t-il compatibilité entre cure psychanalytique et médicaments ?

L’industrie pharmaceutique, s’inscrivant dans le discours capitaliste, tente de répondre au malaise de la civilisation par la production de médicaments psychotropes visant à réduire les douleurs psychiques. Elle vient pallier – par la voie scientifique – à la solution « naturelle » qu’est la toxicomanie. Les êtres humains ont, en effet, de tous temps, tenté de supporter la lourdeur d’exister avec l’aide de stupéfiants, à défaut de pouvoir le faire par la voie de la sublimation comme le travail scientifique, l’art ou la religion. La grande névrose contemporaine est la carence paternelle devant la promesse de jouissance sans limite  proposée par notre société. Les psychotropes sont, dans la même optique, proposés au consommateur comme une euphorie en pilules garantie sous le couvert de la science.

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Lacan, pour de vrai

Paru dans Le Monde, le 20 janvier 2006  (réponse au texte d’André Green paru dans Le Monde du 6 janvier)
 
Le Monde des livres » daté du 6 janvier publie dans sa page Forum un texte ainsi présenté au lecteur : « André Green dénonce la place accordée aux disciples de Jacques Lacan dans les débats actuels. » Ce document appelle plusieurs remarques de ma part.
 
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Le Saint-Prépuce

Paru dans Le Monde, le 31 décembre 2005

 
Jusqu’en 1970, l’Eglise romaine fêtait le 1er janvier la circoncision du Christ. Un changement de calendrier tout sauf innocent

 

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Harry Potter et la Coupe de feu

Paru dans Le Monde Diplomatique de Décembre 2005
 
Si l’on peut reconnaître un mérite à Joanne K. Rowling, c’est celui de nous déconcerter. Dans Harry Potter et la Coupe de feu, adaptation du roman homonyme qui sort actuellement sur les écrans, les pédagogues qui incarnent l’autorité parentale font un choix d’une cruauté inouïe. Ils ordonnent à Harry de participer à un tournoi réservé aux meilleurs élèves de plus de 17 ans, alors qu’il n’en a que 14 et n’est pas candidat ! Et il ne s’agit pas de n’importe quel tournoi, puisque « celui qui échouerait à une seule de ses épreuves n’aurait aucune chance de remporter le titre, ni de survivre ». En clair, l’élite des pédagogues de Poudlard décide d’envoyer un mineur à une mort certaine.
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La Princesse Bonaparte

Il n’y a que très peu de séquences filmiques dans lesquelles Sigmund Freud figure. Je me souviens de quelques extraits où on le voit caresser son chien, fumer son éternel cigare devant une fenêtre (fermée !). Jamais on ne le voit parler de ces patients, et bien sûr, on ne le voit pas parler non plus avec ses patients.

Qui a peur de Michel Onfray ?

Au delà de son aspect polémique, le livre de Michel Onfray soulève plusieurs problèmes dont il convient de ne pas lui laisser la primeur. Il serait catastrophique de laisser présenter les concepts freudiens comme une sorte d’évangile auquel les psychanalystes seraient invités à croire sans pouvoir en contester la validité, et la psychanalyse comme une citadelle de certitudes qui ne pourrait être remise en cause que par un esprit libre l’abordant de l’extérieur.

L’analyse n’est-elle pas réservée à une sorte d’élite intellectuelle ?

Ne faut-il pas être intelligent, avoir une réelle créativité, une certaine culture pour accéder à ce type de thérapie ? D’ailleurs lorsque qu’on lit des récits d’analyse, je note que les personnes interrogées sont toutes issues d’un milieu plutôt « intello » (journaliste, médecin, énarque, inspecteur des impôts…), peu de manœuvres, ouvrières d’usine ou de maçons !

La question présuppose que le genre d’activité qu’on peut s’attendre à pratiquer durant une analyse, serait d’ordre intellectuelle. Il est vrai que la lecture de la plupart des livres publiés par les psychanalystes, ouvrages en général relativement incompréhensibles, laisse penser qu’il en va de même pour les séances de psychanalyse, qu’y participer demande à tout le moins une capacité de compréhension hors du commun. Ce point de vue est tout à fait erroné, de même qu’il est faux d’affirmer que la patientèle des cabinets d’analyste se limite à une certaine catégorie sociale de la population (Je fais partie des ces analystes qui travaillent « en milieu rural », et j’accueille aussi bien des éleveurs que des enseignants, et, du point de vue psychanalytique en tous cas, ils ne sont pas mieux lotis les uns que les autres, ou pas moins capables de se confronter au processus analytique).

« Le Jeu de la mort » Quand l’institution pousse au crime

Au début des années 1960, Stanley Milgram a imaginé une expérience dans laquelle deux volontaires étaient invités à participer à une recherche sur la mémoire : l’un devait apprendre par coeur des suites de mots, et l’autre le questionner en lui infligeant des décharges électriques en cas de mauvaise réponse. La victime était en réalité un autre chercheur qui faisait semblant de souffrir à chaque fois qu’il était puni. Cette expérience a inspiré récemment un documentaire centré sur un jeu télévisé fictif : « Le Jeu de la mort »1.

“Une autre femme”

Des rumeurs courent que Woody Allen a fait 20 ans de psychanalyse. Qui sait si c’est vrai? Il doit pourtant en savoir quelque chose car il a fait un magnifique film, curieusement peu connu, sur les processus en cause lorsque l’on se met à s’écouter – tout comme on le fait en parlant à un psychanalyste.

Sur la pulsion de mort | Robert Samacher

Robert Samacher : Sur la pulsion de mort, Création et destruction au cœur de l’humain, (Editions Hermann, 2009)
 
Probable signe des temps, les ouvrages sur la pulsion de mort pullulent. Elève de Solange Faladé, créatrice en 1983 de l’Ecole Freudienne, Robert Samacher défend vigoureusement un héritage lacanien centré sur la « division » d’un sujet marqué par le concept d’aliénation emprunté à Hegel et qui l’entraîne aux marches de la psychose. Un héritage enrichi par « l’histoire personnelle » et familiale de l’auteur qui en étend l’inventaire jusque dans le réel des institutions psychiatriques. De la doctrine à la clinique, du « lien social » aux « subjectivités », finalement de l’histoire à la politique, ce recueil de textes publié chez Hermann psychanalyse procède du tout analytique, imposant parfois au lecteur l’inconfort intellectuel d’être simultanément ballotté d’un bout à l’autre d’une vaste amplitude de thèmes, mais tous disséqués à la lumière exclusive des enseignements lacaniens.

L’ordinaire de la cruauté | Jean Cooren

Jean Cooren, « L’ordinaire de la cruauté », Hermann psychanalyse, 2009.

 

Le malheur des hommes est la compagne, aussi fidèle qu’insaisissable, de la psychanalyse. Une fréquentation assidue -plus d’un siècle de clinique- qui a permis à ses praticiens de vivre plus sereinement ce concubinage encombrant et intime. Et de comprendre finalement sa glossolalie symptomatique. C’est cet « ordinaire de la cruauté » que le psychiatre et psychanalyste lillois Jean Cooren, freudien libre sinon vagabond, décortique dans un premier recueil publié chez Hermann : séminaires, conférences et articles, autant de subtiles et attachantes réflexions, préfacées, en outre, par son collègue Pierre Delion. 

Serrer la main à son patient?

Y a t-il un quelque chose de pervers, dans le fait que le psychanalyste ne serre pas la main à son patient?

Pour cette question, comme pour bien d’autres, la première invitation est celle d’en parler – justement -à son psychanalyste. Vous êtes étonnée, interloquée, fâchée… Pourquoi avant tout ne pas lui poser la question et lui dire ce qui vous vient à l’esprit à ce propos ?

Mais rassurez-vous, je ne veux pas, à mon tour, ici, vous refuser une main et vous renvoyer la question.

Rêver avec Freud | Lydia Marinelli et Andreas Mayer

Rêver avec Freud : l’histoire collective de « l’Interprétation du rêve » (Aubier Psychanalyse, 2009) de Lydia Marinelli (Auteur), Andreas Mayer (Auteur), Dominique Tassel (Traduction)
L’histoire de la « Traumdeutung » (L’Interprétation du rêve), ce livre fondateur de la psychanalyse publié en 1899 par Sigmund Freud, rejoint finalement celle de son objet : pluriel, chaotique, angoissant ou jouissif, tantôt confus, tantôt d’une précision millimétrique, aussi « unheimlich » que la psyché qui l’élabore, le rêve subit toutes sortes de remaniements qui accompagnent souvent la progression d’un travail analytique. Il intègre de nouveaux personnages, en exclut d’autres, ajoute ou retranche une séquence à un scénario que l’on croyait pourtant définitivement scellé. Au point de pouvoir transformer la catastrophe récurrente de la dernière scène en « Happy End » idyllique ou, plus rarement, de faire soudainement chuter le rêveur de Charybde en Scylla. Cela dépend de l’analyste !