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Rire de soi | Collectif

« Rire de soi »,  Libres Cahiers pour la Psychanalyse, N° 17, à partir de « L’humour », Sigmund Freud, 1927 (Edition In Press).

En quittant l’Autriche de 1938 déjà sous la coupe de l’Allemagne nazie, Freud fut « invité » par la gestapo à écrire quelques lignes sur le fait de « n’avoir pas été maltraité ». Âgé de 82 ans, sous la protection diplomatique de la Princesse Marie Bonaparte, le fondateur de la psychanalyse eut l’audace d’ajouter à cette déclaration imposée, un additif selon lequel, il « recommandait vivement la gestapo  à toute personne ». A t-il à ce moment conscience d’illustrer sa propre théorie sur « l’humour » parue en 1927 et complémentaire de ses réflexions sur le « Mot d’esprit et son rapport avec l’inconscient » (1905) où il explique déjà que cet humour « remplace la colère » ?
 

Conversations psychanalytiques | Ignacio Garate-Martinez

 Conversations psychanalytiques de Ignacio Garate-Martinez (Editions Hermann)

Loin d’être hermétique, la frontière entre « écrivain et psychanalyste », ainsi que se définit l’auteur, regorge de multiples passages clandestins. Celui, par exemple, qui ouvre un chemin entre « conversation » et conversion – analytique s’entend – se donne juste la peine de modifier un signifiant de la lettre. De conversation à conversion, il n’y a, si l’on ose dire, qu’un pas de « ça » à franchir ! Il en va ainsi de ces « conversations psychanalytiques » proposées par Igniacio Garate-Martinez, survenues entre 1982 et 2003 et qui semblent « tracer » l’empreinte de son propre passage des « années d’apprentissage au « bord de la maturité » de sa pratique analytique. Et lorsque l’on trouve parmi ses « sept interlocuteurs », des figures aussi historiques de la psychanalyse que celles d’Octave et de Maud Mannoni, Michel de Certeau, Xavier Audouard, Joël Dor ou Ginette Michaud, le sentier vicinal devient une allée royale. Et si, malgré toutes ces alléchantes mentions, le lecteur hésitait encore, la puissance poétique du style, la profondeur de l’échange, l’authenticité du propos dès les premières pages de cet ouvrage récemment paru chez « Hermann Psychanalyse », achèveraient de le convaincre de s’engouffrer dans le monde de l’intériorité analytique et de la réflexion sur le sens d’un parcours. Une réflexion toujours bornée par la dimension humaine.

L’enfant qui s’est arrêté au seuil du langage | Henri Rey-Flaud

Henri Rey-Flaud : « L’enfant qui s’est arrêté au seuil du langage, Comprendre l’autisme » (Editions Flammarion, Département Aubier, Coll. « La psychanalyse prise au mot »)
Entre 1943, l’année où le pédopsychiatre américain Léo Kanner publie un article qui, en reconnaissant cette pathologie spécifique, marquait la naissance de l’autisme et le livre récent et passionnant de Henri Rey-Flaud « L’enfant qui s’est arrêté au seuil du langage », une lente évolution amplement nourrie par les travaux persévérants de la psychanalyse, a permis de mieux « comprendre l’autisme ». Et surtout de ne plus le tenir comme une affection « d’origine organique irréversible » mais au contraire comme une halte, un arrêt sur image décrivant, avec « sa cohérence et sa logique propres » nous dit l’auteur, une attente destinée à « relancer la rencontre avec l’autre » qui a fait initialement défaut. Là où chez les autres tout-petits, l’entourage maternel ou parental prodigue les éléments nécessaires à l’étayage des émotions et des excitations par le langage, l’autiste doit faire face à un vide sidéral, un immense « trou noir » pour reprendre l’expression de Frances Tustin, dont il tente de se protéger dans une « solitude » qui laisse le corps physique au seul contact du réel.

Blog Addiction: Faut-il craindre une pénurie de joueurs de jeux vidéo ?

Les chercheurs spécialisés en « addiction aux jeux vidéo » risquent-ils de manquer de matière première ? C’est ce qu’on peut craindre quand on voit le nombre de chercheurs en quête de joueurs à tester ! Portés par les médias qui ne cessent pas de parler « d’addiction » pour parler d’habitudes – ils ont inventé récemment « l’addiction à l’automobile » ! -, certains ’addictologues rêvent de renforcer leur spécialité en surfant sur les angoisses des parents. Les voila donc partis pour montrer que « l’addiction aux jeux vidéo » serait la nouvelle hydre de demain. Hélas pour eux, les patients ne suivent pas. Paris, avec sa grande couronne, est plutôt bien lotie : une petite cinquantaine, de patients suivis, mais dont beaucoup présentent une pathologie psychiatrique sous jacente grave. Mais par exemple, sur l’ensemble de la Bourgogne, cinq joueurs excessifs adultes sont recensés et suivis, dont deux avec une pathologie dépressive sévère qui fait passer la question des jeux vidéo au second plan. Alors, pourquoi une telle mobilisation pour un problème aussi mince ? La raison principale n’a évidemment rien à voir avec la médecine et tout avec le marketing. Ces recherches sont destinées à obtenir une augmentation des crédits, de recherche, des postes et des locaux dans une logique de croissance institutionnelle.

Il y a peut-être toutefois une solution. Que les chercheurs retournent leurs instruments sur eux-mêmes. Après tout, Bruno Latour l’a fait en sociologie, en appliquant les méthodes de sa discipline à l’étude du fonctionnement d’un grand laboratoire de recherche. Pourquoi ne pas faire la même chose avec l’outil psychologique ? On pourrait par exemple, faire passer divers tests de psychologie à des chercheurs en addictologie, à des psychiatres et à des psychanalystes, et comparer dans ces diverses populations la construction du narcissisme, le contrôle de l’impulsivité, les formes de l’empathie, ou encore le rapport à la transcendance…

Au moins, ce serait novateur. Je suis prêt à soutenir tout programme de recherche dans ce sens !

Pas de console de jeu avant six ans ?

Certains pédagogues, et quelques commerciaux avides de s’ouvrir de nouveaux marchés, proposent de mettre l’enfant de plus en plus tôt sur les outils informatiques. On a vu même vu des pédiatres vanter les mérites de la console de jeu pour les bébés ! Mus par la même idéologie, des enseignants des maternelles rêvent de mettre les bambins devant des ordinateurs ! Tous ces adultes pressés d’initier les jeunes enfants à l’outil informatique devrait réfléchir à la leçon d’Adobe* . Installer sur un ordinateur un enfant qui n’a pas encore exploré toutes les capacités merveilleuses de sa main risque bien de l’en priver définitivement. Il deviendra l’un de ces « handicapés » dont nous parle l’expérience d’Adobe, voire un handicapé plus gravement mutilé encore puisqu’il ne s’agira pas d’un adulte qui aura fini par oublier les richesses de sa main, mais d’un enfant qui ne les aura jamais découvertes.

La leçon de tout cela ? C’est qu’il est non seulement inutile d’introduire un enfant trop tôt aux technologies informatiques, mais même dangereux. D’autant plus inutile qu’un enfant qui les découvre à six ou sept ans a vite fait de les assimiler, et d’autant plus dangereux que celui qui y est initié trop tôt risque de se détourner du dessin, du découpage et du modelage qui sont autant d’école des pouvoirs de la main. On sait la lutte que j’ai menée contre la télévision avant trois ans. Les technologies informatiques me semblent justifier la même prudence. C’est pourquoi après « Pas de télé avant 3 ans ! », je suis tenté de dire : « Pas de console de jeu avant six ans ! Pas d’Internet avant 9 ans ! ». Cela signifie t il que la télévision et son flux publicitaire soit sans conséquences au-delà de trois ans ? Non, bien sûr. La vigilance doit rester forte pour cadrer le temps passé devant la télévision, puis devant les jeux vidéo, et enfin devant Internet. Mais c’est bien parce que je juge de la plus haute importance les acquisitions rendues possibles par ces divers média qu’il me semble important de ne pas les introduire trop tôt : afin que leur adoption et leur usage aient pu être préparées par les apprentissages précédents.

 

* Voir mon billet de la semaine dernière : « Créez avec vos mains, et pas d’un clic ! »

« Créer de vos mains, pas d’un clic ! »

 La firme américaine Adobe, spécialisée dans la création de divers logiciels – dont le fameux Photoshop utilisé sur la planète entière par les retoucheurs de photographies – vient de faire une découverte passionnante* . Ses employés, pour la plupart informaticiens de haut niveau, seraient des handicapés ! Mais que leur manque-t-il donc ? Ont-ils perdu l’usage de l’ouïe, des jambes ou de la voix, ces cadres rivés à leur écran pour inventer les logiciels qui nous permettront de nous déplacer dans les mondes virtuels de demain ? Non, mais c’est pire. Ils ont perdu l’usage de leurs mains ! Habitués souvent depuis leur adolescence à cliquer de l’index sur le bouton d’une souris, ils ont fini par oublier que la main est le premier outil que l’homme se soit donné pour transformer le monde, et qu’il reste incontestablement le plus polyvalent. N’est il pas le seul à pouvoir créer toutes sortes de prolongements qui lui donnent des possibilités pratiquement infinis ? Bref, les informaticiens d’Adobe auraient fini par croire que le premier outil de l’homme est la souris, alors que la créativité trouve sa source principale dans la main.

Leur direction de cette firme a donc ouvert pour ses employés des ateliers de rééducation placés sous le slogan : « Créez de vos mains, pas d’un clic ! ». Réunis par petits groupes autour d’une table, ils sont invités, comme des enfants en classe d’éveil, à fabriquer de menus objets avec des perles, du fil métallique, et bien sûr des circuits intégrés et des écrans miniatures. Car il ne s’agit pas de faire oublier à ces informaticiens de haut niveau que leur job est d’imaginer les technologies de demain, mais de leur rappeler que c’est en utilisant leurs dix doigts, et en créant dans l’espace réel, qu’ils ont le plus de chance de mettre demain au point des logiciels vraiment innovants.

La leçon devrait être méditée par les parents et les pédagogues. A quel âge faut il réserver l’initiation à l’informatique pour ne pas courir le risque de transformer les enfants en handicapés de leurs dix doigts ?

 

* Article du New-York Times paru dans le Cahier Supplément du Monde daté du samedi 13 septembre. Titre original : « Using Hands to Create, Not Click ».

L’année psychanalytique internationale 2008

L’année psychanalytique internationale 2008 – Editions In Press
Pour ce sixième numéro de l’Année psychanalytique internationale, le Comité de rédaction a décidé de traduire en français, une sélection de textes publiés l’année précédente dans « The International Journal of Psychoanalysis ». Un choix de treize articles aux signatures et aux appartenances doctrinales très diverses qui repose sur une louable ambition : croiser les pratiques cliniciennes sous le chapeau commun de l’Association Psychanalytique Internationale. On relèvera d’ailleurs en parcourant ce volume un message d’adieu des anciens rédacteurs de l’I.J.P. A l’heure de la communication analytique par Internet qui risquait d’enfermer cette publication dans une tour d’ivoire, ses responsables expriment clairement leur volonté d’ouvrir les colonnes au plus grand nombre d’analystes « quelle que soit leur provenance géographique ». Un geste qu’il convient de saluer puisqu’il correspond à la philosophie même de la psychanalyse fondée sur l’échange et la discussion cliniques.

Le joueur et son jeu : êtes vous sensori moteur ou narratif ?

Un joueur de jeux vidéo peut jouer de bien des façons, mais toutes se ramènent finalement à deux modèles : les interactions sensori motrices ou bien les interactions émotionnelles et narratives.
Dans le premier cas, l’interactivité passe par des sensations et des réponses souvent stéréotypées. Les émotions mises en jeu font une grande place au stress : il s’agit d’émotions primaires et pures comme l’angoisse, la peur, la colère, le dégoût… Les angoisses mises en jeu dans cette façon de jouer sont souvent archaïques (il s’agit d’angoisses de désintégration, de morcellement, d’annihilation…). La préoccupation narrative est peu présente et la violence est surtout narcissique dans la mesure où le but est d’abattre le plus grand nombre possible de créatures interchangeables.‏
Dans les secondes, au contraire, les sensations jouent un rôle moins important et la réponse motrice est moins impérieuse : le joueur doit réfléchir avant d’agir. Les émotions mises en jeu sont complexes dans la mesure où le jeu encourage l’identification et l’empathie : le joueur est invité à «avoir des sentiments pour», et « des sentiments avec». Les angoisses mises en jeu peuvent être qualifiée d’oedipiennes dans la mesure où elles engagent une rivalité (il s’agit d’abattre un ennemi puissant pour prendre sa place)‏ et une initiation. La préoccupation narrative est centrale.
Pourquoi cette distinction ? Parce qu’elle permet de comprendre qu’en matière de jeu, tout dépend des interactions que chaque joueur choisit de privilégier. Il est en effet possible à un joueur de privilégier une forme d’interaction à un moment et une autre forme à un autre moment. De façon générale, plus les interactions sensori motrices sont privilégiées par le jeu ou le joueur, et plus il y a un risque de dépendance, tandis que plus les interactions émotionnelles et narratives sont privilégiées, et moins il y a risque de dépendance(1) .
C’est pourquoi les parents doivent s’intéresser aux jeux pour inciter leurs enfants à développer la narration et la réflexion dans leur façon de jouer. Ceux qui s’engagent dans cette voie auront une bonne surprise : ils apprendront à la fois à mieux connaître l’univers des jeux vidéo, et leurs propres enfants.
 
(1) Il s’agit par exemple de jeux comme Shadows of the Colossus, Silent Hill, Fable, Ico, Farenheit, etc.

Faut il interdire aux addictologues de s’occuper des joueurs de jeu vidéo ?

En quelques années, le mot « jeu » est entré dans le vocabulaire de la prévention et de la santé publique. Il n’évoque plus les plaisirs gratuits de la cour de récréation, mais l’enfer de la toxicomanie.
 
Ce sont les jeux d’argent qui ont été le pivot de ce changement. Le pouvoir médical qui s’occupait jusque-là d’alcool, de tabac et de cannabis – avec un succès très mesuré… – a décidé d’apporter sa réponse à un problème de société et s’est créé un nouveau champ de compétence autour de ce qui a été nommé « l’addiction aux jeux vidéo ». Chacun sait qu’au royaume des aveugles, le borgne est roi, et les médecins auto désignés compétents en « addictologie aux jeux vidéo » commencent à publier dans les revues spécialisées et à donner des interviews dans la grand presse. On les reconnaît facilement : ils traitent de la surconsommation de jeux vidéo sur le modèle de la surconsommation d’une substance toxique. Les problèmes sont envisagés de façon uniquement quantitative : le joueur joue un peu, beaucoup, à la folie… Et le remède est dans les alternatives : sport, gratifications scolaires, etc. Bref, il faut intéresser le joueur à autre chose ! Mais ils ignorent le rôle des guildes, des quêtes, les potentialités addictogènes différentes des différents types de jeu, les modalités différentes d’interaction, et toute la nouvelle culture de la relation à soi et à l’autre qui s’y construit. Bref, non seulement ils n’invitent pas à comprendre les changements en cours, mais ils dissuaderaient plutôt de le faire !
 
La réalité est que le monde des jeux vidéo propose aujourd’hui des produits qui ont une complexité et une diversité aussi grande que celles du cinéma. Les narrations y sont fortes, la recherche du sens par le joueur est souvent importante et les processus identificatoires de plus en plus complexes. C’est de là dont il faut partir. Mais les addictologues n’en ont manifestement guère le désir…

Quand des psychanalystes jouent à « Little Brother »

Une mode se répand dans les médias et l’édition. Elle consiste à tenter de deviner les pensées secrètes de nos dirigeants politiques. Disons-le tout net, cette mode est exécrable. Quelle différence y a-t-il en effet entre le rêve des scientifiques qui travaillent à mettre au point des machines permettant d’entrer dans les pensées secrètes des suspects, et cette mode désastreuse qui prétend deviner le fonctionnement mental de tel ou tel ? Dans les deux cas, c’est un fantasme, et un fantasme particulièrement malsain.

Il ne s’agit pas d’une condamnation de principe. A l’époque de Freud, cela pouvait passer pour une fantaisie amusante – à laquelle Freud, ni ses proches élèves, ne se sont d’ailleurs jamais livrés sur leurs contemporains. Mais la culture a changé. Dans les années 1980, on a pu craindre l’avènement d’un contrôle généralisé de chacun par un pouvoir centralisé. Mais ce risque est peu probable dans nos sociétés démocratiques. En revanche, un autre, que j’ai dénoncé dès 2001[1], est de plus en plus menaçant. Il s’agit de la mise en place d’une surveillance de particulier à particulier : des enfants par leurs parents, des jeunes par les directeurs d’établissements scolaires, des conjoints supposés infidèles par leur mari ou leur femme, des employés par leur patron et des consommateurs par des sociétés de publicités ciblées. Il y a plus de danger, aujourd’hui, dans cette tendance générale à prétendre surveiller et analyser que dans la mise en place d’un totalitarisme centralisé, genre « Big Brother ».

Disons le alors clairement : le désir de s’immiscer dans les pensées secrètes d’un inconnu à partir de ce qu’il montre relève toujours d’une logique intrusive et d’un désir d’emprise qui est aux antipodes de l’esprit de la psychanalyse. C’est bien entendu la même chose lorsque la personne observée est un créateur. C’est pourquoi les vrais psychanalystes ne s’intéressent pas aux créateurs, mais à leur œuvre, ce qui est bien différent.

[1] L’intimité surexposée, Paris, Ramsay, 2001 (Prix du livre France Télévision 2002, rééd. Hachette Littérature 2002).