Lorsqu’un enfant de moins de trois ans regarde la télévision, tout lui paraît si incompréhensible qu’il cherche avant tout à retrouver des repères sur lesquels s’appuyer. Et pour cela, il choisit bien souvent d’attacher son attention à celui des personnages qui lui paraît le plus proche de lui-même par ses réactions. Mais comme les héros de ces séries sont assez stéréotypés, l’enfant s’identifie finalement toujours au même modèle : celui qui commande ou bien celui qui est commandé, celui qui cherche ou bien celui qui est cherché ou encore celui qui frappe ou bien celui qui est frappé. En s’identifiant toujours au même profil de héros, les enfants courent alors le risque de renforcer un registre relationnel exclusif. En pratique, ils prennent l’habitude de se percevoir d’une seule façon, comme agresseur, comme victime, ou comme redresseur de torts. Le danger est alors qu’ils adoptent systématiquement la même attitude dans la réalité.
C’est pourquoi le danger de la télévision, pour les très jeunes enfants, n’est pas l’adoption des modèles présentés en référence, comme pour les enfants plus grands. Il réside dans le fait que l’enfant petit, parce qu’il ne comprend rien, fige son développement psychique en prenant l’habitude de se voir toujours dans un seul rôle. La boîte à outils des identifications précoces se réduit et les possibilités du bricolage identitaire s’appauvrissent. La télévision a enfermé l’enfant dans la prison de comportements qui s’auto renforcent.