Sonya Faure et Thomas Lacoste | Mouvements |   14 mars 2007

Que se cache-t-il derrière le retour en force de la valeur travail dans les discours des candidats à la présidentielle ? Les réponses de Christophe Dejours, psychanalyste, dépassent le cadre des présidentielles 2007 et touchent tant à la construction de l’identité des individus qu’à la bonne marche de la cité.

Nicolas Sarkozy rend un répétitif hommage à « la France qui se lève tôt ». Ségolène Royal parle régulièrement au nom des caissières et des femmes employées à temps partiel lors de ses apparitions publiques. Le psychiatre et psychanalyste Christophe Dejours revient sur le recours systématique à la « valeur travail » par les deux principaux candidats à la présidence. Si le travail est à nouveau présent dans les discours politiques, si les intellectuels et politiques ont rompu avec les « analyses aberrantes » sur la fin du travail, que se cache-t-il derrière ce nouveau discours ? Comment à la fois marteler le slogan « travailler plus pour gagner plus » et aduler les réussites individuelles et fulgurantes qui ne reposent plus sur le travail mais bien davantage sur « la triche » et les revenus du patrimoine ? Comment exalter le travail tout en laissant le sous-emploi se développer, et les nouvelles organisations du travail détruire les collectifs ? Pour Christophe Dejours, il faut à nouveau reconnaître la centralité du travail dans la construction de l’identité des individus, mais aussi dans la bonne marche de la cité : « Le travail est un grand apprentissage des règles de la démocratie. Il faut s’atteler à étudier à nouveau, et à combattre les nouvelles formes d’organisation du travail qui de plus en plus instrumentalisent autrui dans un seul but : l’efficacité et le profit. »

1 Le recours systématique à la notion de « valeur travail » dans les discours de Nicolas Sarkozy et de Ségolène Royal a-t-il un caractère moralisateur et culpabilisateur ou au contraire témoigne-t-il d’une reconnaissance de la centralité du travail ? (Pour lire la vidéo, cliquer sur la flèche)

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2 Ce discours n’est il pas dangereux alors que le chômage a explosé ces dernières décennies et que les nouvelles formes d’organisation du travail sont source de souffrance et de violence ? (Pour lire la vidéo, cliquer sur la flèche).

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3 Paradoxe : ces discours individualisent le rapport au travail, alors que cette individualisation et l’effritement du collectif provoquent souffrance et violence ? (Pour lire la vidéo, cliquer sur la flèche).

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4 Dans le rapport que vous avez rendu au gouvernement, vous écrivez que le travail pourrait être un puissant moyen de conjurer la violence dans la cité. Comment ? (Pour lire la vidéo, cliquer sur la flèche).

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5 Selon vous, depuis le tournant libéral des années 80, le désintérêt des politiques, des chercheurs et des médias pour le travail s’est traduit par une perte de savoir sur le travail ? (Pour lire la vidéo, cliquer sur la flèche).

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Psychiatre et psychanalyste, Christophe Dejours est professeur au Conservatoire des Arts et métiers (CNAM) et directeur du Laboratoire de psychologie du travail et de l’action. Il est l’auteur de Souffrance en France, sur la souffrance au travail et l’injustice sociale. Il a également présidé la commission « Violence, travail, emploi et santé » qui a participé à l’élaboration du rapport « Violence et santé » rendu au gouvernement en octobre 2005.
Les propos ont été recueillis par Sonya Faure et Thomas Lacoste, en collaboration avec l’Autre Campagne (www.lautrecampagne.org).