La conscience, c’est en premier lieu la conscience de soi. Celle qu’a le sujet de lui-même. C’est un paramètre identitaire, comme toujours fictionnel, car construit essentiellement par le langage.
Cette conscience de soi, qui s’élargit à celle du monde, se construit donc dès que commence l’acquisition du langage, sous le regard et les commentaires bienveillants ou réprobateurs des parents…
La conscience prendra le relais de cette autorité ultérieurement.
La conscience de soi se projette dans un idéal (être ou faire bien ou mal..). De même que celle du monde qui exige raison, vérité, justice, etc..
Bref, on reconnaîtra sans mal tous les paramètres de ce que l’on appelle “la” morale (dont j’ai apporté une définition ici ).
Autrement dit : la conscience de soi et du monde se construisent sous l’égide des interdits. Lesquels s’adressent… à la conscience. Tout comme ils l’ont fait émerger.
Faut-il s’étonner que l’effondrement des interdits et de la morale, a fortiori la promotion du contraire – la jouissance sans limite, préconisée par le libéralisme (pour stimuler la consommation et donc le profit) autant que par le libertarisme (qui préconise la permissivité jusqu’à revendiquer aujourd’hui la légitimation des transgressions) – ait pulvérisé la conscience, engagé les modèles de conduite (comme toujours proposés par voie élitaire) vers le cynisme et un sado-masochisme suicidaire ?
Cette inversion des paramètres identitaires structurants du sujet et de la configuration politique, économique et sociale conduit logiquement à l’émergence des pulsions incontrôlables et à l’épanchement des fantasmes dans le champ public. Lesquels ouvrent, comme nous pouvons le constater, à l’expansion des passages à l’acte et des conflits violents (qui se produisent quand le langage n’est plus opératoire) et à la dissolution du lien social.
Paris, mai 2008